Brins d'apostille
Ces deux-l�, ils faisaient équipe depuis si longtemps qu'on avait fini par les prendre pour des dieux siamois. Pas la moindre anicroche dans leur accord� un accord m�ri de la consonance de leurs pulsions. Plénitude d'un accord complice.
Complicité. Ce seul mot rec�le l'essence de tous les pourquoi.
Pour �tre tissée des fibres hypersensibles de l'intimité et gonflée de l'émoi délicat des plaisirs partagés, la complicité ne supporte pas la morsure d'une trahison, et surtout pas la pique d'un mot blessant.
Plénitude sans faille� une paille suffit � l'anéantir.
Un beau matin, alors que rien ne laissait prévoir un tel embrasement, il n'a suffi que de l'aigu d'une note crissante pour que, sur l'instant, l'un et l'autre décident d'une rupture immédiate, irrémédiable. éclatement irrépressible par lequel la Mort impose sa loi. Un seul titre au décret d'application : annihilation des commu�nications.
Avant midi, chacun était parti de son c�té, assuré de vouer � l'autre une haine sans borne.
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Éphém�re triomphe de la dispersion. La plénitude brisée, la complicité volatilisée dans le souffle de la dislocation ravageuse, l'infini des vibrations de la passion s'est éparpillé en une myriade d'harmonies. Incoercible attirance, déj� elles se cherchent, usent d'un temps jusqu'avant inexistant. La résonance, ineffable mé�moire de la complicité, recompose les n�uds de sa symphonie intemporelle, contraint l'expansion de ce hiatus chronique.
Avant que n'arrive le crépuscule, alors que tout paraissait consommé, chacun refusant de l'avouer, chacun le sachant pertinemment s'était remis en qu�te de l'autre. L'absence de bornes avait déj� trouvé ses limites. éperdus, devant l'inextricable des pistes, l'un comme l'autre ignorait celle que l'autre battait. Alors, comme des fous, ils se sont mis � chercher, � questionner, � s'informer. Embarqués dans une longue errance, ils sillonnent le monde. Sur chaque indice, ce sont spéculations, conjectures, recoupements� et un nouveau départ.
Voyageur, il m'est arrivé de rencontrer l'un ou l'autre. Les nouvelles que je pouvais alors donner n'étaient déj� plus que des traces puisqu'aucun des deux ne pouvait rester en place. Ce matin j'ai rencontré Cendra, nous avons pris rendez-vous pour d�ner ce soir dans la brasserie o�, je crois me souvenir, ils s'étaient connus. � midi je suis tombé nez � nez avec Ludovic; retenant mon souffle, je l'ai convié m�me endroit, m�me heure.
Finalement j'ai changé mes plans. Ce soir, j'irai � la cinéma�th�que. Merlin repasse.
©  
Jean-Michel Pionetti &
éditions autodafé. ISBN 2-9805745-0-3
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