Les origines de l'Univers et son devenir sont dans l'air du temps
le virus du Big Bang ne nous avait pas épargnés. Cosmos fascinant, receleur des plus beaux mythes. Évidemment ce qui nous asticotait c'étaient les questions sans réponse, celles qui n'ont pas de sens, parce qu'on ne sait pas par quel bout les prendre faute de leur avoir trouvé le moindre bout. Des questions du genre : « Qu'y avait-il avant ? », « La matière est-elle une transformation, une transmutation de l'esprit ? », « Le temps existait-il avant le début de l'Univers ? », « À quoi est due la pérennité des forces qui assurent la cohésion de la matière ? »
Et puis est apparue « la singularité ». Un terme élégant pour masquer l'impossibilité de donner une réalité physique au point de départ de l'Univers. Moment zéro de la création que la physique est impuissante à décrire, les lois actuelles de la mécanique quantique n'autorisant pas en vertu du « principe d'incertitude » de se positionner sur cette origine. Aussi la physique prend-elle l'histoire de l'Univers en route, un petit instant après sa création, alors qu'il est déjà en expansion et a commencé à se refroidir. Une seconde après le Big Bang, l'Univers est déjà très dilaté et sa température est tombée autour du milliard de degrés. Suivant les normes du modèle Big Bang, chercher à remonter jusqu'au temps zéro conduit à un point de dimension nulle, d'une densité infinie et d'une température inexprimable. Bref, à une singularité. À l'approche de ce point, les lois aujourd'hui définies perdent pied, «
on ne peut pas prédire comment l'Univers aurait commencé parce que toutes les lois de la physique connues se détruisent à la singularité du type Big Bang [2] ».
Dommage !
Cela a dû être un moment palpitant
Il l'a été assurément
nous y avons été voir.
Forts de notre propre principe d'incertitude et de l'inadéquation des lois connues pour décrire la singularité, nous ne nous sentions liés par aucune obligation de réserve. Aussi, mutatis mutandis, sans vergogne, nous n'avons conservé de la théorie en vogue que les morceaux qui faisaient notre affaire
ceux qui allaient trouver un écho dans notre histoire.
Si vous êtes « droitier », vous ne serez peut-être pas intéressé à connaître les fondements de l'histoire de Théo Junior et vous aurez su l'interpréter sans qu'il soit nécessaire d'y ajouter plus de justificatifs. Dans ce cas, vous considérerez les éléments de Morphologies qui suivent comme une option.
Morphologies
Puzzle d'initiation. Les éléments à mettre en place ne sont pas trop nombreux
La singularité. Elle aurait pu être une difficulté de taille. Sa résolution s'est faite en la divisant en deux, deux singularités successives, chacune singulièrement « simple ».
Une bulle
un volume creux. Une évidence qui, semble-t-il, ne ferait pas l'unanimité ! Lorsque l'Univers est pris en considération par les astrophysiciens, il a déjà commencé son expansion, il a donc un volume
le volume d'une bulle, car, lors d'une déflagration, le souffle qui bouscule forme une onde de choc qui laisse derrière elle du « vide ». Une explosion, « big » ou pas, engendre une sphère creuse, pas une sphère pleine ! Mais comme on s'accordera assez facilement pour dire que l'Univers est plus constitué de vides que de pleins, la discussion sur ce point et son volume n'aura pas le loisir de trop enfler la controverse.
« L'Univers devrait avoir commencé son expansion dans un état lisse et ordonné. Il n'aurait pas pu être complètement uniforme parce que cela aurait violé le principe d'incertitude de la théorie quantique. [2] » Soit ! Lisse et ordonné, sans être uniforme. Voilà un état qui nous convient.
« Il a dû y avoir de petites fluctuations dans la densité et les vitesses des particules. [2] » Qu'à cela ne tienne. Nous nous sommes accommodés de ce point de détail.
L'Univers, nous apprend-on, présente une grande uniformité dans toutes les directions. Cela aussi nous convient parfaitement.
Le temps a pris naissance avec l'Univers. Nous avons posé cette donnée comme un postulat (formule commode qui permet en l'occurrence de s'affranchir d'une démonstration oiseuse), et on va en découvrir tout le bon sens.
Dans le flacon, le savon liquide (du savon et de l'eau) se trouve dans un état lisse, non grumeleux, sans relief, un état indifférencié. Aucune évolution n'est à attendre, il peut rester comme ça une « éternité », il n'a que faire du temps. Un chronomètre en marche ou arrêté à côté du flacon ne changera rien à l'affaire. C'est l'état indifférent.
Qu'un anneau vienne à être plongé dans le savon liquide, il en ressortira chargé du fruit d'une singularité la première singularité , un film liquide bien arrimé au bord du cercle. Un peu de la solution, juste ce qu'il faut pour former le film, vient de « saisir sa chance » de sortir de son état indifférent pour passer dans un état lisse et d'une relative stabilité, un état qui n'est plus insensible au temps. La surface à deux faces ainsi créée est exposée à un milieu « vide » qui lui dévore une partie de sa substance (de l'eau s'évapore). Si rien ne doit être entrepris sur ce film, déclencher le chronomètre ne serait pas très utile, si ce n'est pour connaître sa durée de « vie » avant qu'il ne disparaisse dans l'éclatement de la membrane appauvrie de sa substance.
Mais ce film n'a pas longtemps à attendre.
Un souffle éventuellement le souffle désordonné d'un éternuement vient perturber l'état lisse du film liquide, le déformer, le gonfler et, dans le cas de l'éventualité pneumatique et bruyante, entraîner des fluctuations de densité et de vitesse des molécules. Une bulle encore rattachée à l'anneau prend forme
et survient la seconde singularité, d'une fugacité extrême, fragment de temps insaisissable où la bulle se détache pour devenir « instantanément » autonome. Transformée en un espace clos, la bulle est « homogène » dans toutes les directions. À sa surface, aucune cicatrice ne vient révéler la trace de la déchirure originelle, comme si la rupture n'avait jamais eu lieu.
Tout cela a été très vite et, surpris, nous n'avons pas déclenché le chronomètre au moment où la bulle se fermait. Le chronomètre est parti une seconde trop tard, une seconde qui va manquer à notre décompte de l'évolution de la bulle, mais au moins nous aurons saisi le caractère insaisissable de la réalité de cet instant
une réalité fulgurante, certes, mais non explosive. Si nous avons manqué le temps « zéro », ce manque n'aura pas de quoi créer une frustration, car il devient clair que « les lois » qui régissent maintenant la physique et le physique de la bulle se sont appliquées dans l'instant où, ses amarres rompues, elle s'octroyait les vertiges d'une troisième dimension
Pas avant ! Pour un observateur qui n'a pas eu le loisir de suivre toute la scène, il va maintenant devenir difficile d'établir un lien de parenté quelconque entre cette bulle d'azur qui évolue dans un espace libre et un flacon de liquide à vaisselle qui traîne sous un évier
Les lois qui président au destin aérien d'une bulle n'ont, en première analyse, que peu de points communs avec celles qui prévalent au sein d'un liquide amorphe.
Réflexe de « gaucher ». Comme il est tentant de traduire ces trois états l'indifférent dans le flacon, le film dans son anneau et la bulle autonome en termes d'états d'énergie. Trois états constitués des mêmes éléments (des molécules de savon (2); combinées à des molécules d'eau) qui présentent des niveaux d'organisation (3); et de stabilité très différents. Gagner en organisation peut présenter des risques, mais c'est le prix à payer pour prendre de la hauteur.
Images d'un « univers » en ballottement. Une bulle peut se dilater ou se contracter sous l'influence de facteurs extérieurs chaleur d'un rayon de soleil, caprice barométrique, etc. dont la bulle perçoit les effets mais non les causes, causes qui sont en dehors de son champ de connaissance (aussi ces effets peuvent-ils être qualifiés de transcendants). Pellucide, elle évolue sans se soucier de savoir si dans son ombre diaphane se cache une spécieuse fonction de temps
un temps que Jr avait lui-même oublié. Quant à cette bulle particulière, née dans le chaos d'un spasme phrénique, elle n'est pas « stérile », elle emporte quelques virus des molécules si pleines d'organisation qu'elles sont déjà presque vivantes. Mais cet « ensemencement » n'est que le fruit d'un événement fortuit venu perturber la routine d'un jeu; il ne saurait avoir valeur de règle quant à la fécondité des bulles en général.
Laissons cette bulle à son évolution, période de transition entre un début et une fin, pour précisément jeter un coup d'il à cette fin, car le scénario, malgré les souhaits de Jr, ne prévoit pas l'immortalité.
Le terme de la vie d'une bulle est une autre singularité, un Petit Puitch, résultat d'un aléa de parcours qui peut être transcendant, comme la rencontre avec un rouge-gorge trop curieux, ou immanent, comme une dilatation extrême que les forces de cohésion du réseau eau-savon la membrane de la bulle ne peuvent plus contenir. En fait, cette dualité est loin d'être propre aux histoires de bulles fantasques, immanence et transcendance participent de concert au bal des dépendances; ici elles s'emboîtent, là elles s'articulent. Ainsi, les forces de cohésion qui dérivent de la nature même des structures constitutives de la bulle forces qualifiées d'immanentes se trouvent à être soumises aux effets d'influences transcendantes, comme l'influence d'une ascension trop poussée qui conduit à un gonflement, à une expansion de la bulle.
La formation d'une bulle prend un peu de temps
le temps de souffler. Ce temps a été bref dans le cas de la dernière bulle de Jr, mais on peut l'imaginer plus long (j'ai essayé, cela peut durer plusieurs secondes, ce qui est assez long en regard de la durée de vie habituelle d'une bulle). En revanche, la singularité ultime le puitch est toujours abrupte, dépourvue de transition. Voilà de nouveau l'indétermination, mais ici elle n'est ni physique ni mathématique, elle serait plutôt linguistique ! Quel qualificatif peut rendre compte de la rapidité, de la fulgurance de l'éclatement d'une bulle ?
Mieux qu'un qualificatif, une image sans gravité, l'image d'une construction qui verrait disparaître l'un de ses piliers constitutifs.
La cohésion des structures de notre Univers est assurée par plusieurs types de forces (le répertoire non exhaustif actuellement en vigueur en compte quatre : les forces gravitationnelle et électromagnétique, les interactions nucléaires, la faible et la forte (ou liaison quarkienne) de ces forces, Newton ne « disposait » que de la première). Que l'une de ces forces (avec la gravitationnelle, l'image vient plus facilement) cesse, pour un motif que nous dirons simplement non déterminé, de remplir son office ne serait-ce que l'ombre d'un embryon d'une microseconde
et c'est « puitch
Univers a pu ! », un Petit Puitch qui ne laissera même pas de trace et que personne n'aura la jubilation de découvrir.
Beaucoup de bruit pour du vide
Observance des principes de la publicité comparative oblige, je ne peux manquer l'occasion de mettre en avant quelques incongruités du modèle concurrent (rien ne me forçant à démasquer celles du modèle dont je fais la promotion).
Parlons donc du Big Bang.
Galéjade que ce nom forgé pour frapper les imaginations, faire vivre un mythe. « Big », peut-être
tout est relatif. « Bang », difficile à croire. Certains diraient, non sans quelque raison, qu'il n'y a pas eu de bruit parce qu'il n'y avait personne pour l'entendre, que le bruit n'est qu'une transcription cérébrale de vibrations criblées via cochlée, enclume et marteau , et que l'onde, pour « big » qu'elle ait pu être, était, comme toute onde qui se respecte, parfaitement silencieuse, nonobstant que de surcroît, à la pointe du temps, crevant un espace encore vide, marquant la frontière dynamique de l'Univers, ce front d'onde ne rencontrait qu'une froide indifférence. Ce sur quoi, d'autres viendraient polémiquer en jouant du vieux dicton : « Il n'est pire sourd que celui qui ne veut pas entendre. » Et, venant aviver plutôt qu'arbitrer l'ergoterie de ces érudits de basse-cour, la voix du rationalisme scientifique, se prévalant de la péroraison, lâcherait une formule aussi simple que péremptoire, bien connue de tous les maîtres ès big bang : « le bruit ne se propage pas dans le vide
»
Aussi le charivari primitif de l'Univers n'aura-t-il pu se manifester qu'à l'intérieur de lui-même conflit interne qui ne regarde pas l'extérieur et uniquement dans sa prime jeunesse, alors qu'il était encore suffisamment « concentré » pour ne pas être quasiment vide ce que, par son expansion, il est devenu. (Notre planète si peu pleine, que vidée du vide qui occupe l'essentiel du volume de ses atomes, elle emplirait à peine une chope de bière n'est qu'un insignifiant trou dans le vide. Correction (ou sursaut anthropien) :
est un signifiant trou dans le vide.)
Je crois me souvenir que, plus tard, quelqu'une m'a fait remarquer que ce genre de discussion, autour de la propagation du son dans un univers plutôt vide, n'était que « faire l'âne pour avoir du bruit ».
Avec gains et fracas
Les systèmes d'interprétation élaborés par les physiciens pour retracer le déroulement, « l'histoire » d'un phénomène comme celui de l'origine de l'Univers au travers d'un modèle comme celui du Big Bang , doivent disposer dans leurs équations d'un certain nombre de données. Ces équations (le sujet a déjà été évoqué dans Un vol de goélands) ne font que traduire des lois tirées de l'observation et de l'expérimentation.
Dans les valeurs prises en compte pour expliquer le modèle en question, on va trouver des éléments qui traduisent l'état des forces en présence (gravitationnelle et autres) et des interactions entre des structures de toutes sortes. La loi des grands nombres trouvant là matière à s'appliquer c'est bien le moins pour un modèle qui concerne l'Univers , un certain nombre de paramètres statistiques viendront justifier un modèle bâti sur tout un lot de combinaisons aléatoires entre particules aux charmes énigmatiques. La procédure est classique, mais ce que l'on ne trouve pas dans le bruyant modèle du Big Bang, c'est, disons-le, l'essentiel, les données dont aucun physicien ne saurait se passer pour décrire un phénomène : l'état des conditions initiales du système. Et pour cause ! Le scénario décrit par les équations ne peut remonter jusqu'au point zéro, moment privilégié du Big Bang, moment secret dénommé « singularité ». Les conditions initiales manquant, le modèle connaît donc une certaine imprécision.
Pour un modèle qui se veut « rationnel », aboutir à un mode de création de l'Univers ex nihilo, voilà qui fait désordre. Entre crédibilité et croyance, la marge se trouve tout d'un coup bien ténue.
En revanche, le scénario qui met en scène la formation d'une bulle est d'un autre acabit quant aux conditions initiales. Celles qui président à la formation d'une bulle sont autant dans la forme de l'anneau, dans la composition du liquide moussant que dans l'intensité du souffle
Un cocktail de facteurs indéterminables mélangés à des éléments très précis et à l'étonnante faculté de s'autodéterminer (lorsque l'anneau est plongé dans le mélange eau-savon, c'est exactement, à l'atome près, ce qui est nécessaire qui prend place dans le périmètre pour former le film). Un cocktail qui ne souffre pas d'être gâté par deux ingrédients peu raffinés : le hasard et
le bruit
De plus, une bulle a bien j'en ai été témoin un début et
une fin. La création d'une bulle, même au prix de l'enchaînement de deux singularités, ne sort pas du néant.
Le modèle du Big Bang est présenté comme physiquement bien ficelé, mais aux yeux du béotien, avec cette « singularité » qui ne trouve pas sa place, il apparaît « inconvenant ». À moins que
flash
À moins que ce soit par cette voie détournée qu'ils soupçonnent bien de n'être qu'un cul-de-sac que, se découvrant un manque, les adeptes de la rationalité scientifique ont choisi de renouer avec la « déraison ». Chercher le secret des Origines, pièce maîtresse de l'occulte s'il en est, et produire cette histoire fabuleuse de Big Bang
Retrouver le chemin de l'irrationnel avec un tel fracas, il fallait oser. Ils ont osé. Chapeau et bienvenue !
Aussi l'histoire de cette quête quête, à n'en pas douter, instinctive n'en est-elle encore qu'à son début. Ce super cerveau, cerveau associatif, cerveau-réseau, dans lequel intercogitent un nombre de plus en plus grand de questionneurs, est loin d'avoir dit son dernier mot
mot que, du reste, il ne dira jamais, se réservant toujours l'option d'aller un mot plus loin. C'est bien le propre d'une quête que d'être sans fin.
Bulle ou Big Bang
Joute de bouffons dans des assauts iréniques. La quête du Graal a dispersé les chevaliers d'Arthur par monts et par vaux, la quête des Origines, parce qu'elles fascinent, rassemble et propulse tous azimuts, au fin fond du Cosmos et au tréfonds des océans, à la recherche des vestiges des premières vibrations de l'Univers ou des premières civilisations
Mnémosyne veille. L'Atlantide, d'hier ou de demain, sommeille dans nos zones rêvogènes.
Alors à défaut de pouvoir syntoniser la symphonie originelle d'un Big Bang aphone, vous pouvez, le temps d'une bulle, vous laisser enlever dans la féerie de ces univers éphémères.
Je ne connais pas son nom, mais je ne peux résister au plaisir d'évoquer cet artiste qui présente un numéro fascinant. Des bulles, il ne fait que des bulles, les associant dans des compositions éblouissantes d'originalité. Et, ce n'est pas une boutade, il façonne des bulles cubiques. Un enchantement divin !
Innominée génitrice
Plus tard, inévitablement, le sujet est revenu sur le tapis, et, dans un retournement singulier, pour un fétu ridicule, une paille dérisoire, c'est le cabot baptisé d'une onomatopée pétaradante qui a repris l'avantage. Le Big Bang venait de se dépouiller de cette bigoterie chargée de scientificité qui a déjà transformé plus d'un observatoire en sacristie. Lorsqu'il se montre pour ce qu'il est une déflagration , on peut faire avec sans avoir à se gaver de tartuffades eschatologiques toutes suantes de croyances si peu laïques. Le souffle d'une déflagration habille une uvre de destruction, il éparpille ce qui était entrelacé, disloque ce qui était assemblé, pulvérise ce qui était fusionné. Pour triviales qu'elles aient pu paraître, ces lapalissades dissolvaient d'un coup sans un quelconque adjuvant mystique l'aporie de l'Origine : la naissance fulgurante de l'Univers ne pouvait être que l'uvre de la Mort. |