Ostinato… homo: credo - Jeux d'artifices
Jean-Michel Pionetti
éditions autodafé
ISBN 2-9805745-0-3

 

Annexe 1

Cartes en kit
 

    Si on avait demandé à Homère dans quel ciel était allée l'âme de Sarpédon, et où était celle d'Hercule, Homère eût été bien embarrassé : il eût répondu par des vers harmonieux.

Voltaire

 

Astrographie elliptique pour le montage, la lecture ou la démystification de la carte du ciel.

    Nous avons vu (Des sens des signes) que le montage d'une carte du ciel établi par un astrologue se ramenait au « repérage » de dix corps célestes - le Soleil, la Lune et huit planètes - à partir des données angulaires fournies dans les éphémérides pour chaque jour de l'année.
    Voyons, sur un exemple, quelle est la connexion entre ces angles de visées et l'ordonnance du système solaire fixée dans un « instantané »?

    Pour alléger la représentation, hormis les deux éléments de base - le Soleil et la Terre -, seules quatre planètes vont figurer sur la carte : Mercure, Vénus, Mars et Jupiter. Les deux premières circulent sur des orbites « internes » (par rapport à celle de la Terre), les deux dernières sur des orbites « externes ». Bien que les orbites de ces planètes soient représentées de façon simplifiée (des cercles au lieu d'ellipses), l'échelle du graphique, grosso modo, respecte les distances moyennes au Soleil. (C'est pourquoi notre satellite - la Lune -, si voisin qu'il aurait fallu le coller à la Terre, brille, ici, par son absence.)
    Support de la représentation, car « écran » sur lequel sont projetés et mesurés les angles de visée, la voûte céleste est divisée en 12 secteurs calés sur les 360 divisions du cercle d'Hipparque, chaque secteur portant le nom vernaculaire attribué au cours de l'ère du Bélier (conservant ainsi le sens calendaire et la vocation d'almanach du Zodiaque, sans considération aucune pour l'agencement cartographique des étoiles en constellations). Quant aux dimensions données sur ce graphique à cette ceinture - la bande zodiacale -, elles relèvent, faute de pouvoir disposer d'une feuille qui devrait avoir au bas mot les dimensions de la planète, des caprices d'une échelle aussi arbitraire qu'incommensurable… et on va voir pourquoi.
    À la date choisie pour l'exemple - qui sera celle du radix d'un natif de la fin octobre -, on pourrait trouver dans une éphéméride les relèvements suivants : Soleil - 6° en Scorpion, Mars - 10° en Verseau, Mercure - 15° en Scorpion, Vénus - 15° en Balance et Jupiter - 15° en Taureau. Ces positionnements correspondent respectivement aux angles 216° (210+6), 310° (300+10), 225° (210+15), 195° (180+15) et 45° (30+15), mesurés sur le rapporteur zodiacal.
    Muni de cette série de valeurs, pour situer les points d'ancrage de la trame de votre carte du ciel, vous n'avez plus qu'à les reporter sur un simple cercle dont le centre est occupé par l'observateur que vous êtes, puisqu'il s'agit d'une représentation des visées faites d'un « point de vue » géocentrique. Vous obtiendrez alors une figure similaire à celle de l'insert 1.
    Sur une carte du ciel, qui se trace « à l'aveugle », à la seule lecture des mesures d'angles, seuls ces derniers « comptent ». Les distances de la Terre aux différents astres considérés, de la Lune voisine à Pluton passablement lointain, sont toutes rapportées à une même et unique valeur, celle d'un quelconque rayon. Point d'exclamation.
    Le graphique principal de la représentation fournie ici - qui, lui, n'est pas une carte du ciel au sens astrologique, mais un simple plan tiré au niveau de l'écliptique - rétablit quelque peu, pour les mêmes valeurs angulaires, l'échelle interplanétaire.

Prendre l'ascendant

    Soleil en Scorpion, voilà qui donne le signe. Mais, et l'ascendant ?
    L'ascendant, pour faire court, on dira que c'est la montre. Si le signe indique le mois de naissance, l'ascendant, lui, donne l'heure.
    Qu'est-ce à dire ? Tout simplement que la Terre tourne, et que, si dans la lumière de l'aurore, c'est le « secteur du mois » qui se trouve pointé par l'apparition du Soleil – le lever héliaque – , les onze autres secteurs du Zodiaque vont également défiler dans l'axe du levant (1). La revue - diaphane de jour, scintillante de nuit - dure le temps d'une révolution de la Terre, et se fait donc à raison d'un secteur toutes les deux heures. Visible ou invisible, il y a toujours un morceau du Zodiaque qui passe sur l'horizon est. À l'heure de la naissance, c'est le secteur pointé qui donne l'ascendant. C'est ainsi, aux variations de latitude près, que né le 29 octobre à 6 h du matin, le client sera Scorpion - ascendant Scorpion, à midi, Scorpion - ascendant Verseau, à 6 h du soir, Scorpion - ascendant Taureau et à minuit, Scorpion - ascendant Lion.

Des aspects anguleux

    Si vous êtes versé dans le jargon astrologique relatif aux différents aspects, et si vous avez le coup d'œil astral, vous aurez peut-être remarqué que, sur la figure principale, Vénus et Mars sont « en opposition ». Bien vu ! À cela près que dans les représentations astrologiquement conformes (inserts 1 et 2), ces deux astres se trouvent « en trigone » - aspect, au dire des connaisseurs, particulièrement bénéfique.
    Sans révéler les mystères de la Tétrabible, le graphique reproduit dans l'insert 2 - qui a tout de l'allure d'une carte du ciel - sera plus éloquent que des explications alambiquées sur les aspects des planètes. Le schéma illustre trois types d'aspects : en trigone (a avec c, a avec e et c avec e), en carré (a avec b, a avec f, b avec d et d avec f), en opposition (a avec d, b avec f). On notera que « a » sera dit en trigone avec « c », qu'il y ait ou pas un astre en « e » (la même remarque vaut pour tous les types de conjugaisons). En effet, pour caractériser un aspect, le seul élément à prendre en compte est l'angle défini par deux astres avec la Terre pour sommet. Pour le trigone, cet angle devra être proche de 120° (voir l'angle a  c) ; pour le carré, il s'agira d'un angle droit (a  b); l'aspect aura le caractère d'opposition pour un angle voisin de 180° (a  d). Pour faire face à la diversité des cas de figures - et avoir réponse à tout -, la topologie combinatoire de l'astrologie dispose de quelques autres angularités propitiatoires comme le sextile chanceux (60°) ou le curieux quinconce, révélateur des secrets de l'inconscient.

Vertige des échelles

    Pour compléter le tableau, quelques considérations à la googol, bien peu astrologiques pour être astronomiques.
    Vous aurez sûrement remarqué la curieuse localisation de l'orbite de Jupiter au-delà de la « ceinture » d'étoiles qui constitue la bande zodiacale. Sur ce graphique, si on avait voulu faire figurer les orbites d'Uranus, de Neptune et de Pluton, elles se seraient également retrouvées au-delà du ciel d'étoiles, de l'autre côté de la voûte. Vous aurez compris qu'une telle incongruité n'est due qu'à l'impossibilité de faire figurer - sur ce schéma - la voûte céleste à la même échelle que celle utilisée pour les orbites des planètes. Impossibilité ? Jugez plutôt !
    Parmi les étoiles du Zodiaque, on trouve quelques étoiles relativement brillantes. Aldébaran dans la constellation du Taureau, Spica dans la Vierge et Antarès dans le Scorpion. Ces trois étoiles sont distantes respectivement d'environ 68, 261 et 424 années-lumière. Aussi, calcul fait, à l'échelle du graphique, Aldébaran serait à près de 80 kilomètres, Spica se trouverait à environ 300 kilomètres, quant à Antarès, on la rencontrerait à plus de 480 kilomètres !

Aberration et relativité

    Incidence hors propos de ces considérations astronologiques : qu'adviendrait-il de la séduisante symétrie rayonnante et dodécagonale des visées astrales s'il nous venait l'envie, sur ce graphique, de déplacer la Terre sur son orbite ?
    Essayez, et vous allez voir que la symétrie du système de divisions angulaires devient très vite toute biscornue : les douze angles de trente degrés vont devenir douze angles inégaux et de mesures changeantes. « Avancez » la Terre de cinq ou six mois, et l'effet devient littéralement cacographique.
    En réalité, il ne s'agit là que d'une aberration due à une erreur de parallaxe, erreur qui est du même type que celle que vous feriez avec un appareil photo muni d'un objectif et d'un viseur séparés. Pour un gros plan, lorsque l'objet à photographier est très proche, la vue cadrée à travers le viseur n'est pas celle que va enregistrer la pellicule à travers l'objectif. En revanche, pour un sujet placé suffisamment loin pour être considéré comme « à l'infini », il n'y a plus vraiment de différence entre ce qui est visé et ce qui est photographié. Aussi, pour des considérations analogues, les informations angulaires rapportées ici demeurent parfaitement correctes quelle que soit la position de la Terre sur la figure, au centre ou n'importe où ailleurs sur son orbite, car… à l'échelle de ce graphique, les premiers grains de l'écran céleste devraient être représentés à environ cent kilomètres et la trame à quelques milliers ! (À une échelle plus adaptée à la balistique des fantassins, la situation serait à peu près la suivante : l'intégralité du système solaire, avec ses neufs planètes, réduite à la dimension du point central d'une mire de visée - un point d'un millimètre de diamètre -, la relativement proche Aldébaran serait « collimatée » à plus de 100 mètres, quant à 99% des étoiles de la bande zodiacale, elles seraient hors de portée, bien au-delà du kilomètre.)
    Là où certains se plaisent à souligner l'aberration, on ne trouve que la relativité. (On remarquera que du temps où la Terre était le nombril de l'Univers, on ne risquait guère d'avoir le souci de la parallaxe…)

Du soleil plein la vue

    À plusieurs reprises, il a semblé nécessaire de spécifier que la lecture du point de la constellation visée sur le Zodiaque par l'alignement Terre-Soleil se faisait à l'aurore, avec la marque du soleil levant. Pourquoi à l'aurore ? car, à bien y regarder - et à cet égard le graphique est parlant - l'alignement Terre-Soleil qui justifie du « signe » en cours ne va qu'assez peu changer dans l'intervalle d'une journée (en gros, le déplacement angulaire journalier de la Terre est d'un degré).
    La raison tient de l'éblouissement. Pour observer, depuis le sol de notre planète, simultanément les étoiles et un rayon de soleil, il n'y a de commode que l'aube de l'aurore ; plus tard, les étoiles sont « éteintes », et, de nuit, l'observateur tourne le dos à l'astre diurne. C'est également par la raison de ce même éblouissement que Vénus et Mercure - surtout Mercure - ne sont généralement discernables que dans la lumière crépusculaire de l'aube ou de la brunante. Ces deux planètes circulant sur des orbites internes à celle de la Terre, c'est du côté ou dans les parages du Soleil qu'il faut les chercher. Aussi, si vous avez saisi le truc de la carte et des aspects, incidence « bénéfique et rassurante » de ces « petites » orbites, vues d'ici, Vénus et Mercure n'auront jamais le mauvais goût de se conjuguer en opposition !


(1) Encore une fois, le secteur d'un signe zodiacal ne doit pas être confondu avec la constellation du Zodiaque qui porte le même nom (revoir la planche Glissade à travers les ères dans Ères de Zodiaque).


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